À la mi-mars 2020, l’épidémie de Covid-19 a imposé un arrêt partiel ou total d’activités jugées « non essentielles », quand d’autres sont mobilisées face à l’urgence. Au-delà de sa dimension économique, cette crise affecte aussi les conditions de vie et les conditions de travail, renforçant des vulnérabilités existantes et en générant de nouvelles. Une note de France Stratégie publiée le 29 avril 2020 propose une typologie inédite des métiers dans la crise en cinq groupes.
Les métiers que l’on peut qualifier de « vulnérables de toujours » conjuguent une difficulté à travailler à distance et des statuts souvent précaires (un sur cinq exerce en CDD ou en intérim). Ces 4,2 millions de travailleurs, majoritairement des hommes, artisans et ouvriers de l’industrie et du bâtiment, sont traditionnellement confrontés à des conditions de vie et de travail difficiles.
Les « nouveaux vulnérables » (4,3 millions d’emplois) affrontent une crise inédite liée à l’exercice même de leur métier qui les met en contact avec le public. Leurs activités sont ralenties, voire interdites, et leur statut les fragilise (31 % de contrats intermittents ou d’indépendants en solo). Dans ces métiers du transport, de l’hôtellerie-restauration, des services aux particuliers, de l’art, de la culture et du sport, la vulnérabilité financière se double d’une incertitude sur l’avenir.
Les 10,4 millions de professionnels directement ou indirectement sur le « front » sont ceux dont les activités apparaissent essentielles dans cette crise. Ce sont tous les métiers de la santé, de l’éducation, de la propreté, de l’alimentaire et de sa distribution, et les professions régaliennes. Peu fragilisés économiquement, ils n’en sont pas moins exposés à une vulnérabilité d’ordre sanitaire par leur contact direct avec le public pour les trois quarts d’entre eux. Parmi les plus mal rémunérées et davantage occupées par des femmes, ces professions sont exposées à une intensification du travail.
Quatrième groupe, les télétravailleurs sont exposés à un nouveau risque d’hyperconnectivité (3,9 millions d’emplois). Essentiellement occupées par des cadres, ces professions doivent, à distance, assurer la continuité du travail et préparer la reprise d’activité. Soumis d’ordinaire à une plus forte intensité du travail, ils voient leur charge mentale et les difficultés de conciliation avec la vie familiale renforcées par la crise.
Enfin, nombre de professions intermédiaires ou d’employés qualifiés (4 millions d’emplois), le plus souvent en inactivité partielle, sont protégés du licenciement à court terme par leur statut. Mais leur difficulté à télétravailler les expose à des risques d’éloignement de la sphère professionnelle et de désocialisation.
Lire La Note d’Analyse de France Stratégie, avril 2020, n°88 (16 pages)